Quelque chose de Pompéi
mine de rien

« toi arpenteur dénudé d'un terrain glissant
tu ne sais pas où tu mets le pied pauvre équilibriste
tu ne sais pas où tu vas tu y vas
où l'hygiène de l'art te mènera
Ceci n'est pas un problème
sur les gouttes les traces de savon tu glisses
tu t'accroches à ce que tu connais ton image millénaire
ton reflet s'efface tu dérapes tes contours t'échappent
la mémoire dissout tes souvenirs après quoi cours-tu
rince ta mémoire dans le lavabo miroir
où ce qui s'épluche à ton insu
file sous un robinet approximatif
un peu trop chaud pas assez froid et vice versa
ouvre ta fenêtre pour la rose blanche jetée à la figure
tu perds la tête tu perds ta tête
ton torse s'effiloche en créant un alphabet desquamé
pour un lieu sans parole
poésie de la désillusion
silencieuse
dépolie
imprévue
qui se retourne sur la table du boucher
pour un oui mais non
rougir jusqu'au blanc des yeux
plus jamais propre
jusque dans le récuré de tes veines
un morceau de blanc passé
dépôts sans âge sur l'étal du grand jour
j'entends les tranches de couteaux larme blanche
la peau les copeaux en vrac
le ruban qui s'évide sans moi
l'eau qui s'agrippe et caracole avec mes cellules
j'attrape le temps dans un filet à papillons percé
je capture la disparition
je l'entasse dans des seaux
disparaître est un chantier en cours
une chasse au trésor à inventer
je ne suis qu'un même mouvement dans une suite
que chacun récupère comme le tapis familial
le visage d'un visage d'un visage un écho ricoche
sur le Savon de Ponge j'éponge
jusqu'à blanchir une page
du recto au verso je m'élime m'élimine
je tisse un métier à déclinaisons je m'effiloche
sur les échardes qui me tiennent en éveil
mes chiens de garde
j'entends les coeurs symphoniques sous le bitume
et les secondes qui me pénètrent et ne ressortent pas
rouge ordalie j'en fais mon ferment qui
au détour d'un pli réinvente l'eau et le feu
hors lumière que sacre la légèreté d'une feuille d'or
dans l'autodafé je renais
avec le temps saigné à blanc »
Sophie Braganti